Selon la FEVAD, plus de 500 millions de colis ont été livrés en France en 2017. Faut-il s’inquiéter de l’impact environnemental du e-commerce et de la pollution Internet ? Un éclairage détaillé sur le sujet.
Quelques chiffres sur la problématique
Le e-commerce ne cesse de grossir
La FEVAD (1) annonçait 93Mds€ de CA en France en 2019. Parallèlement à d’autres problématiques telles que la détérioration du tissu économique des centres habités, des questions émergent autour de l’impact environnemental du e-commerce et de la pollution numérique. Environ 500 millions de colis envoyés sur un an, ce n’est pas rien… Cela fait environ 16 colis par seconde ! Le numérique est un vecteur de consommation qui influence fortement l’environnement.L’empreinte carbone du transport numérique
Dans une époque où le transport représente la cause numéro 2 des émissions de CO2 dans le monde, nous sommes invités à nous servir de moyens de transports moins polluants. Mais il ne faut pas oublier que le transport de marchandises y contribue également. A titre d’exemple, à Paris, environ ¼ des émissions de CO2 (2) viendrait des transports de marchandises. L’effet du numérique sur ces émissions ne peut être ignoré. Cependant, pouvoir affirmer que l’e-commerce représente un fléau pour l’environnement n’est pas en réalité une chose simple. Afin d’alimenter la réflexion de chacun, voici point par point des considérations autour des sites internet, les livraison, l’emballage et les retours.Des boutiques « virtuelles »… mais pas trop
L’intangibilité des sites internet ne devrait pas nous faire oublier que tout site doit être alimenté en électricité pour que cela tourne. Et qui parle de kilowatts, parle d’émissions ! Le numérique, avec la consommation énergétique nécessaire pour faire tourner les sites web, contribue à l’empreinte carbone globale. Le cabinet Greenspector a récemment établi un classement des sites e-commerce les plus énergivores (3). Un site comme Leboncoin fait consommer environ 100MWh/mois à ses consommateurs, soit l’équivalent de la consommation mensuelle d’environ 1100 Français. Un chiffre relativement faible par rapport au nombre d’utilisateurs, qui avoisine les 28 millions de visiteurs uniques par mois (4). Si à cela on ajoute une estimation de la consommation (5) des 2 datacenters Leboncoin (400 serveurs estimés), nous pourrions avoir une vision globale de l’impact énergétique de l’activité. Bien que difficile à estimer, cet exemple rend l’idée de la non neutralité du processus d’achat. Acheter sur internet demande de l’énergie, une consommation que le secteur numérique devrait prendre en compte. Cependant, nous devrions nous poser également d’autres questions… Combien de ressources consommeraient une ou plusieurs boutiques physiques pouvant accueillir 28 millions de visiteurs uniques par mois ? Et si l’énergie utilisée était certifiée comme « verte » ? Le numérique pourrait alors être plus respectueux de l’environnement.La livraison : une question d’optimisation numérique
D’après l’INSEE, le transport de marchandises a augmenté d’environ 15 points sur la période 2013/2017 (graphique ci-dessous). L’augmentation d’autres types de transports et services laisse présager que cette hausse soit due généralement à une meilleure conjoncture économique et partiellement à l’impact du e-commerce. L’année 2013, a été en effet une année de reprise d’un point de vue des indicateurs économiques français. Et quoi qu’il en soit, le transport de marchandises augmente que l’achat se fasse en ligne ou pas. Mais en soi, la livraison de produits achetés sur internet est-elle si néfaste pour l’environnement ? Plusieurs variables doivent être considérées afin de pouvoir faire une comparaison entre un achat en ligne et un achat en magasin : Livraison à domicile vs livraison en point relais ou magasin Le lieu de livraison peut influencer l’impact environnemental. La livraison en point relais ou en magasin permet de réduire le nombre de KM parcourus en ville par rapport à des livraisons à domicile, puisqu’elle limite le nombre de déplacements. Certes il faut réduire les émissions de CO2, mais ce sont avant surtout des polluants comme les particules fines qui ont le plus de conséquences. Livraison rapide vs livraison standard Pour une raison similaire à celle ci-dessus, les livraisons standard permettent d’optimiser la cargaison des camions de livraison en réduisant le nombre de trajets pour un nombre équivalent de colis livrés. La livraison rapide force le respect de la contrainte temporaire à tout prix et produit un excès de déplacements. Livraisons gratuites et sur abonnement Les livraisons gratuites n’auraient pas de véritable impact. Cependant, les livraisons payantes ont le mérite de limiter les achats impulsifs. Pour garder une conscience propre, il faudrait donc éviter les abonnements donnant accès à ces services qui ne font que multiplier le nombre de paniers pour un même client et une même enseigne Achat sur marketplace ou sur le site de l’enseigne Acheter sur une marketplace permet également d’optimiser les livraisons à la fois du côté du vendeur, qui brasse des volumes de vente plus importants, et du côté du consommateur qui peut regrouper ses achats dans un seul panier et se faire livrer en une fois (là où c’est possible). Lieu de production Quoi que l’on dise sur le mode de livraison, la variable la plus importante reste le lieu de production. Par exemple, une livraison rapide à domicile d’un produit régional restera moins polluante que l’achat en magasin d’un produit d’origine asiatique. S’il vrai que le e-commerce permet aujourd’hui aux consommateurs d’acheter loin, ceci est vrai aussi pour les commerçants de proximité qui peuvent se fournir en produits du monde entier. Le déplacement personnel Se déplacer soi-même pour acheter le produit est également une solution à fort impact environnemental. Parcourir plusieurs KM en voiture à la recherche du produit peut vite rendre la recherche et l’achat sur internet plus efficace par rapport à l’achat en magasin. C’est 1 camion livrant X produits vs X acheteurs se déplaçant pour aller le chercher et l’acheter en magasin. La production à la commande Acheter sur internet peut permettre de travailler plus facilement à flux tendu et réduire la surproduction. D’ailleurs, quand vous commandez un produit chez un commerçant ça revient exactement au même ! Mais en soi, la livraison de produits achetés sur internet est-elle si néfaste pour l’environnement ? Plusieurs variables doivent être considérées afin de pouvoir faire une comparaison entre un achat en ligne et un achat en magasin :- Livraison à domicile vs livraison en point relais ou magasin
- Livraison rapide vs livraison standard
- Livraisons gratuites et sur abonnement
- Achat sur marketplace ou sur le site de l’enseigne
- Lieu de production
- Le déplacement personnel
- La production à la commande
De l’emballage inutile qui augmente la pollution des achats internets
L’emballage contribue à la pollution environnementale sous 3 aspects :- sa production ;
- la gestion des déchets ;
- la création du « transport de vide ».
Des retours payants ?
De plus en plus d’enseignes non alimentaires permettent de retourner le produit gratuitement afin d’enlever des freins à l’achat et réduire le gap qui sépare le commerce en ligne du commerce physique. En pratique, un retour n’est rien d’autre qu’une livraison x2 dans le cas du e-commerce. Si certaines considérations restent les mêmes que pour les livraisons, il est indéniable que sur les retours les commerces de proximité marquent un point. Ceci, tant que le stock du magasin physique sera un jour écoulé (en cas d’invendus les produits sont souvent renvoyés au centre logistique de l’enseigne). Les retours gratuits ont contribué à l’augmentation du taux moyen de retour dans le e-commerce. Ce sont 25% des achats en ligne qui sont renvoyés au vendeur, contre un taux moyen de 8% en boutique (7). Le taux de retour est pourtant très variable et dépend à la fois du type de produit, de la qualité de sa description et de la politique de retour de l’enseigne.C’est vous qui décidez de l’impact de vos achats
Je me sens de boucler l’analyse en disant que l’impact intrinsèque du e-commerce sur l’environnement existe mais reste relativement faible par rapport aux avantages qu’il peut apporter et par rapport au commerce traditionnel (de proximité). De la même façon que dans d’autres domaines, l’impact environnemental dépend majoritairement du choix du consommateur final. Afin de réduire l’impact du e-commerce sur l’environnement, il faudra donc agir sur les 2 fronts :- mettre le consommateur en condition de comprendre les enjeux de ses choix lors du parcours client
- l’orienter dans son choix en lui donnant des informations et des alternatives supplémentaires à celles existantes.
- compensation du CO2 émis par la plantation d’arbres (Reforest’action)
- mise en avant de la provenance du produit et affichage du bilan carbone (Karbon)
- optimisation des emballages pour éviter le transport de vide (Cubiscan)
- livraison à vélo (Stuart, Colisweb)
- livraison en point relais (Pickup)
- optimisation de l’empreinte carbone des serveurs (Greenspector)